MOTOCYCLISME
Bienvenue dans le temple de la vitesse
25. août 2011, 22h30
Jean-Claude Schertenleib | Le Matin
Aux Etats-Unis, on a le goût des formules. Excessives ou pas. Indianapolis? «La capitale mondiale de la course», promet-on sur le fronton du «Hall of fame».
Indianapolis, c’est aussi une ambivalence totale lorsque, une fois l’an, les puissantes monoplaces de l’IndyCar sont remplacées par des motos, engins de si petite taille qu’ils semblent perdus dans ce décor trop grand. © DR
GP D’INDIANAPOLIS
De l’avion, en phase d’approche vers l’aéroport d’Indianapolis, on ne voit d’abord que de gigantesques structures métalliques, qui entourent un large ovale de bitume. Un peu plus loin, les éléments déformés de l’Indiana State Fairgrounds, qui s’est écrasé il y a deux semaines lors d’un orage violent, provoquant la mort de cinq personnes, n’ont pas encore été débarrassés, enquête oblige. Bienvenue dans la «capitale mondiale de la course», bienvenue dans ce temple gigantesque, où chaque mètre carré de bitume est un souvenir. L’ovale le plus célèbre de la planète, la course la plus folle de l’histoire, un écrin à la taille de l’événement, dans lequel vous ne pénétrez qu’après avoir montré carte blanche.
Ambivalence permanente
Aux différents contrôles, casquette sur le chef, des commissaires aux visages burinés vous souhaitent le bonjour, heureux que vous les considériez en montrant promptement ce petit morceau de plastique qui ouvre (presque) toutes les portes. Indianapolis, c’est le temple de la vitesse. Indianapolis, c’est aussi une ambivalence totale lorsque, une fois l’an, les puissantes monoplaces de l’IndyCar sont remplacées par des motos, engins de si petite taille qu’ils semblent perdus dans ce décor trop grand. Pour eux, on a tracé à l’intérieur de l’ovale un circuit routier tortueux à souhait, avec même un virage à angle droit qui ramène sur le rectiligne principal. Encore un mythe, ce ruban de bitume coupé en son milieu par la ligne d’arrivée faite de briques ocre, le revêtement original de cette piste née il y a 100 ans.
Des bouteilles de gaz
Indianapolis, on aime où l’on n’aime pas, mais personne ne peut rester insensible à cette atmosphère particulière, rehaussée par des rappels permanents à l’histoire, via des plaques commémoratives, des images d’un autre temps, celui où le héros suisse se nommait Louis Chevrolet et pas encore Thomas Lüthi. Assis au fond de son stand, le Neuchâtelois Giulian Pedone, qui découvre l’endroit, a de la peine à en croire ses yeux: «Tout est gigantesque, comme si l’architecte s’était trompé d’échelle; j’ai pourtant l’habitude de la grandeur des Etats-Unis, puisque j’en ai aussi la nationalité, grâce à ma mère, mais là, c’est à peine croyable.» Grandeur? Décadence, aussi? Non, ambivalence, on vous le disait: «En revanche, c’est le premier circuit sur lequel je me retrouve où il n’y a pas de compresseur automatique dans les stands. Ici, il faut faire confiance aux bouteilles de gaz, qui se vident en un rien de temps.»
Plus qu’un choc des cultures, on est bien, ici, au carrefour de deux époques. Entre la tradition désormais centenaire et un modernisme qui hésite encore à s’affirmer.